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Il ferma les yeux et se concentra pour arrêter le temps mais le pare-brise vola en éclat. En

même temps que la pluie de verre sur son visage il sentit quelque chose passer sous les roues. Un
choc terrible le projeta contre le volant. Son énorme ventre fit office d’airbag, coupant sa respiration
pour une durée qu’il ne put déterminer.

Un doux silence.
Il ouvrit les yeux. Sa vue était redevenue nette. Son angoisse s’était envolée. Une épaisse

brume grisâtre enveloppait la voiture et s’y engouffrait par le pare-brise, telle un nuage apaisant. Il
était mort mais s’en fichait. C’était même mieux comme ça. Par contre il ignorait qui était cette
jeune femme aux allures de poupée désarticulée, à côté de lui. Elle aussi se réveillerait certainement
bientôt.

À mesure qu’il recouvrait ses esprits Martin prenait conscience de l’état de la voiture. Son

rythme cardiaque s’emballa : non seulement il était mort, mais il avait déjà franchi les portes du
Paradis ! Des milliers de cristaux de sucres constellaient tout l’habitacle, mêlés à un sirop sans
doute à base de fruits rouges.

Comme un enfant il en amassa un maximum au creux de son énorme paume. Il jubila en

pensant à tous ceux qui lui avaient toujours refusé ce genre de plaisir. Puis il engloutit tout, d’une
traite.

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